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Lorsqu’elle c’était engoncée dans cette robe, Laurette n’avait pas imaginé que sa vie pusse changer d’une façon aussi radicale en l’espace de quelques minutes.
Le matin, elle s’était encore levée à sept heures précises. Comme c’était toujours le cas, elle avait eu beaucoup de mal à émerger et descendre déjeuner, les courtes nuits auraient un jour raison d’elle, elle en était persuadée. Pourtant elle continuait, elle jouait, elle sortait, elle buvait, elle dansait, toutes ces choses qu’elle avait auparavant repoussé. C’était un peu comme une vengeance sur la vie, sur son enfance qu’elle jugeait malheureuse parce que moins risquée que celle des autres enfants de son âge. Et probablement encore plus maintenant qu’elle avait expérimenté les joies et les douleurs du premier amour.
Quoiqu’il en soit, elle avait décidé de s’amuser, de vivre un peu, même si ça restait parfois effrayant. C’est vrai, elle avait craint les agressions dont elle entendait tant parler. Mais au final, il ne lui arrivait jamais rien, elle rentrait toujours au milieu de la nuit, en silence, parfois plus ou moins consciente, mais toujours en un seul morceau. Tout était sous contrôle, au point qu’elle en oubliait parfois d’où elle venait, les événements qu’elle avait a honoré mais qu’elle manquait inévitablement pour pouvoir rattraper un peu de sommeil.
« Tu es en retard. Prends garde à toujours être à table cinq minutes à l’avance. »
Nous y étions, sa mère, cette femme froide, calculatrice, avare. Cette femme qui l’empêchait justement de vivre et s’amuser comme toutes les personnes de son âge devrait le faire, celle qui la forçait à assister à de trop nombreuses soirées et réceptions où elle ne servait manifestement à rien. Et par-dessus tout, cette femme qui pensait pouvoir régir sa vie et l’obliger à faire ce qu’elle pensait être bon pour elle, jusqu’à briser ses rêves.
« Excusez-moi. »
L’ambiance restait tendue, l’attente de la seule figure masculine de la maison ne faisait que la renforcée. Et, inévitablement, la discussion allait débuter, les conflits aussi, avant que Laurette n’en ait assez et quitte la salle sans avoir rien avalé.
« Margot donne une réception privée ce soir. Tu y es évidemment invitée et attendue. »
Elle avait envie de hurler, de pleurer, de s’enfermer dans ce vieux placard poussiéreux derrière les cuisines. Pourtant elle n’en fit rien, elle se contentait d’attendre, en silence, les yeux baissés sur son assiette, abandonnant la partie avant même qu’elle n’ait commencée.
Et la voilà, en fin d’après-midi, une longue robe vert émeraude sur son lit. C’était bien une des rares choses qu’elle appréciait dans la situation actuelle, les vêtements élégants qu’elle avait le droit de porter. Elle s’observait dans le grand miroir sur pied de l’autre côté, elle n’était pas ce qu’on pouvait appeler une belle jeune femme. Elle était petite, osseuse, pâle… Seigneur elle n’avait même pas assez de poitrine pour que ça puisse en avoir le nom. Comme une enfant, ce qu’elle était après tout, ce n’était pas l’âge ou bien sa position en société qui faisaient d’elle une femme.
« Laurette, tu es splendide ce soir ! »
Un léger sourire vint étirer ses lèvres, Blandine, sa meilleure amie, venait d’arriver et de la sauver. Bientôt elles seraient toutes les deux parties, envolées vers une autre soirée, une de celles que sa mère abhorrait. Elle avait hâte, tellement hâte qu’elle ne remarqua l’homme à côté de Blandine que quand celle-ci le lui présenta. Théodore. Le même qu’elle avait rencontré quelques semaines plus tôt, lorsqu’il avait voulu prétendre au rôle de futur époux.
« Blandine, ça me fait plaisir de te revoir. Théodore, je suis enchantée.
– Pas autant que moi. »
Ses lèvres se posant sur le dos de sa main la firent frissonner.
« Cet émeraude vous va parfaitement au teint. »
Évidemment, c’était la robe qu’elle avait du porter le jour de leur rendez-vous. Elle savait maintenant pourquoi sa mère avait été aussi satisfaite en la voyant.
Mittea