Sexe, drogue et violence, la nouvelle tendance des romans d’ado ?

Harry Potter a désinhibé la littérature jeunesse. Exit les récits trop sages. Aujourd’hui, les romans abordent sans fard la sexualité, la drogue ou la violence.

Lord Voldemort n’est peut-être pas le seul « dont on ne prononce pas le nom » vaincu par Harry Potter. En treize années d’existence littéraire, et sept tomes, le jeune sorcier a beaucoup grandi. Et eu affaire à maintes reprises à un thème jusqu’à lors plutôt tabou pour des aventures du rayon jeunesse : la mort. Orphelin de naissance ou presque, Harry déplore par la suite, au cours de son adolescence, le décès de plusieurs autres proches. Mais le garçon l’affronte à chaque fois avec courage et, surtout, sans détour.

Mais si Harry Potter défie le mal et la mort avec vaillance, il a plus de difficultés, en revanche, avec l’amour et la sexualité. Deux thèmes qui sont centraux dans Twilight, le bestseller de Stephenie Meyer, et dans Vampire Diaries. Dans les deux cas, c’est un vampire qui tient la vedette. Naguère personnage effrayant et maléfique, il symbolise dans ces deux séries la beauté et la jeunesse éternelle. Quant à ses relations amoureuses, elles sont torturées mais, surtout, pas « fleur bleue ».

Le vampire pour évoquer les problèmes de drogue

Le vampire sert également de vecteur pour évoquer d’autres problèmes, en particulier la drogue. « Dans Vampire Diaries, la soif de sang humain est perçue comme une véritable addiction, écrivent Stéphanie Plasse et Laura Guien. Damon (ndlr : le héros principal) calme ses pulsions à coup de grands verres de whisky. Les héros ressemblent à des camés à l’héroïne, en recherche perpétuelle de leur dernier shoot. »

Dernier domaine traité par la nouvelle vague de la littérature pour ados : l’ultraviolence. Dans Hunger Games, de Suzanne Collins, le monde s’est enfoncé dans le chaos. Pour survivre, tout le monde doit se battre. Le gouvernement, lui, ne trouve rien de mieux que de lancer un jeu télévisé, les Hunger Games (littéralement des « jeux de la faim »), où des jeunes de 12 à 18 ans se livrent des combats à mort. Et ce côté trash séduit les ados. Aux États-Unis, il s’est vendu 7 million d’exemplaires (total des trois livres de la trilogie). En France, le premier tome a atteint 100 000 exemplaires, tandis que le troisième, à peine sorti, navigue déjà autour des 40 000.

Distance critique

Pourquoi un tel succès ? « L’émergence de ce type de roman tient à un environnement culturel, cela vient d’une certaine anxiété, d’une angoisse ambiante que ressentent les auteurs, notamment avec le nombre de catastrophes naturelles et leurs effets relayés extrêmement vite par les médias », avance Natacha Derevitsky, directrice d’édition chez Pocket Jeunesse, qui a fait le pari d’éditer les Hunger Games.

Selon Xavier d’Almeida, directeur de la collection dans laquelle sont publiés ces mêmes Hunger Games, l’explication tient plutôt à la distance critique qu’essaie d’adopter la nouvelle génération des auteurs jeunesse. Une attitude directement inspirée de celle des auteurs de science-fiction. « Les romans sont plus romancés, plus accessibles et moins techniques que dans la vraie SF », détaille Xavier d’Almeida.

« Pas de cicatrices »

Et le jeune lecteur, lui, ne craindrait rien : « Les représentations de la violence ou de la sexualité sont comprises par les lecteurs comme des «représentations» et non pas comme la réalité ou un miroir fidèle de la réalité, explique Joëlle Turin, critique littéraire, spécialiste de la littérature jeunesse. Elles peuvent déranger, voire blesser au moment de la lecture mais elles ne laissent pas de cicatrices, elles suscitent une élaboration, une mise à distance, une activité du lecteur qui n’est en rien passif et dupe.»

(d’après Slate)

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