Le livre de sport tire la langue

2010 a été une année sans pour les éditeurs d’ouvrages de sport. Football, biographies et vélo ont eu un coup de pompe. Seuls les livres pratiques ont surnagé.

La Coupe du monde de football 2010 était très attendue, et pas seulement par les supporters. Comme il y a quatre ans, lors de la précédente édition en Allemagne, les éditeurs avaient préparé un certain nombre de livres autour du foot. Et n’espéraient qu’un bon parcours des Bleus pour voir leurs ventes exploser.

Une mini-grève et un tour en car plus tard, ils ont déchanté. « Nous avions prévu une importante production avant le Mondial, avec plus d’une demi-douzaine d’ouvrages, confirme Jean-Louis Fertjaine, directeur de la maison d’édition du même nom. Les résultats ont longtemps été corrects, avec une moyenne de 5 000 exemplaires. Mais les ventes se sont arrêtées net à partir de la mutinerie des joueurs. » « La manière a été bien plus préjudiciable que le seul résultat », confirme Hugues de Saint-Vincent, directeur général de Hugo & Cie. L’éditeur avait eu l’idée, a priori judicieuse, de précéder la Coupe du monde par une biographie de… Nicolas Anelka.

Les biographies en berne

Même les livres consacrés à la faillite des Bleus ou au scandale Anelka / l’Equipe n’ont pas réussi à redresser les ventes. « Nous avons imprimé 15 000 exemplaires de Histoire d’un scoop (NDLR : un document sur le rôle de l’Equipe dans l’affaire Anelka), mais vendu seulement la moitié », avoue ainsi Laurence Gauthier, de chez Prolongations, la branche édition de l’Equipe. Mais pas d’inquiétude. « A lui tout seul, le football représente encore le double des ventes de tous les autres sports réunis », tempère Jean-Louis Fertjaine.

Les éditeurs ont également réduit radicalement leur production de biographies officielles de sportifs en activité. Car le genre n’a plus la cote. En cause, la fadeur du contenu : afin de ne pas ruiner leur carrière (et/ou de voir s’envoler de juteux contrats publicitaires), les joueurs hésitent à bousculer le milieu et sa loi du silence. Conséquence, les ventes ne suivent plus, même quand les éditeurs essaient de sortir des sentiers battus.

Le vélo tendance rétro

En 2008, Yves Derai, directeur des éditions du Moment, s’y était essayé avec Basile Boli. Dans Fini de jouer, l’ancien défenseur de l’Olympique de Marseille s’exprimait beaucoup sur l’Afrique et la politique, mais très peu sur le football. « Un échec, reconnaît Yves Derai. Les lecteurs attendaient qu’il y parle de foot. Ils ont été déçus. »

Le cyclisme semble lui retrouver une nouvelle jeunesse, en misant sur… la nostalgie. Finie l’époque pas si lointaine où l’édition publiait les témoignages d’anciens tricheurs ou de nouveaux délateurs. La tendance, c’est plutôt le revival des belles heures. Ainsi, Jacob-Duvernet qui, après ses bonnes ventes de l’année dernière, continue en 2011 avec les valeurs sûres. La maison d’édition attend beaucoup de Les grands champions du Tour de France et Les drames du Tour du France, deux ouvrages où sont exaltés l’héroïsme des anciens, le panache et l’esprit chevaleresque.

Le pratique c’est chic

Finalement, les livres qui s’en sortent le mieux sont les ouvrages pratiques. Il est vrai que les Français n’ont jamais autant couru, nagé, sculpté leur corps et tapé dans un ballon. Sans forcément avoir l’envie de s’inscrire dans un club. En l’absence d’un encadrement d’experts, les guides ont fleuri. En tête des ventes, des ouvrages sur la préparation physique, la natation, le handball, etc. Optimistes, certains prédisent même un avenir radieux au genre. « L’ouvrage pratique est un accessoire désormais intégré au reste du matériel, ose par exemple Grégoire Lartigot, directeur des ventes et du marketing chez Amphora. Il est devenu aussi indispensable que la paire de chaussures, le sac ou le chrono. »

(d’après Livres Hebdo n°861, 15 avril 2011, pp. 61 à 66)

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