Quel cadre juridique pour l’auto-édition?

L’auto-édition est un sujet qui intéresse nombre d’entre vous. Emmanuel Pierrat, avocat au bureau de Paris, a récemment écrit cet article très complet sur le cadre juridique de l’auto-édition :

(…) Le cadre juridique de l’auto-édition est (…) très souple, puisque plusieurs statuts sont autorisés pour exercer cette activité. L’auteur auto-édité doit cependant peser avantages et inconvénients à l’aune de la responsabilité et de la fiscalité.

L’exercice sans forme juridique précise, c’est-à-dire sans créer de personne morale (société ou association), est parfaitement admis.

Toutefois, selon l’administration fiscale, l’auteur auto-édité sans structure juridique particulière ne se verse pas des droits d’auteur. Il est donc soumis au strict régime des bénéfices non commerciaux. De même, aux termes de la doctrine administrative, les auteurs qui s’éditent via une société civile uniquement dédiée à la publication des œuvres de ses membres sont considérés comme des auteurs auto-édités. C’est-à-dire, là encore, qu’ils ne jouissent pas du régime fiscal assez favorable des droits d’auteur, assimilables à des salaires et susceptibles d’être étalés sur cinq ans en cas de ventes substantielles et donc de rentrées financières conséquentes.

Par ailleurs, il a déjà été jugé par la Cour d’appel administrative de Bordeaux, en 1992, que l’auteur auto-édité qui financerait ses œuvres par des encarts publicitaires au sein des ses ouvrages est soumis au régime des bénéfices industriels et commerciaux.

Il est donc plus judicieux, en particulier fiscalement, de se faire verser des droits d’auteur par une structure spécifique (association ou société), même si celle-ci sera elle-même soumise à une fiscalité plus corrosive.

De plus, l’absence d’étanchéité entre le patrimoine de l’entreprise éditoriale et les biens propres de l’auteur/entrepreneur peuvent dissuader de procéder par la voie de la plus grande simplicité. Il est donc parfois préférable, surtout en cas d’activité régulière et de tirages importants, de « s’abriter » en créant une structure spécifique dans le but de s’auto-éditer.

Créer une association présente des avantages minimes sur le plan fiscal et comptable. La réforme de 1998 du régime des associations a reconnu à celles-ci la possibilité de développer une activité lucrative, sous réserve de respecter strictement plusieurs conditions. L’association n’est alors soumise ni à l’impôt sur les sociétés, ni à la taxe professionnelle, ni à la T.V.A.

À défaut de remplir les critères fixés par l’administration fiscale, l’association sera assujettie fiscalement au même titre qu’une société commerciale. Les autorités s’intéressent en premier lieu à l’intéressement des dirigeants à la gestion. Le critère qui fait alors entrer l’association dans le champ de la « lucrativité » est constitué par le versement au profit des dirigeants de rémunérations ou d’avantages, y compris de droits d’auteur.

Le second critère, issu de la réforme de 1998, consiste à comparer les activités lucratives de l’association avec celles qu’exercerait une entreprise commerciale proprement dite. L’administration vérifie notamment l’état de concurrence, en examinant le produit, le public, les prix pratiqués et la publicité utilisée.

La constitution d’une entité commerciale avec limitation de responsabilité peut être vraiment intéressante. Sont à exclure la société en commandite comme la société en nom collectif, qui ne permettent pas de limiter la responsabilité des associés.

L’auteur-l’éditeur peut donc recourir à la société à responsabilité limitée – la fameuse SARL – ou à la société anonyme. La SARL est nettement préférable, en raison tant de la « lourdeur » administrative de la société anonyme que des contraintes en termes de montant du capital ou de nombre d’associés, peu compatibles avec la notion d’auto-édition…

Car la SARL peut ne comporter qu’un seul associé. Elle porte alors le nom d’EURL (entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée). Mais les banques demandent en pratique à son fondateur une caution sur ses biens propres, ce qui enlève beaucoup de charme à ce statut.

Les sociétés commerciales sont soumises à la TVA, à l’impôt sur les sociétés, à la taxe professionnelle, etc. Mais elles permettent de se verser des droits d’auteur, ce qui redevient intéressant fiscalement… La boucle est bouclée et le bilan est clair pour ceux qui seraient tentés de mettre en pratique l’édition sans éditeur : une « petite » production livresque n’appelle pas d’usine à gaz ; une structure d’édition s’impose dès lors que l’activité devient substantielle.

Pour découvrir d’autres chroniques juridiques sur l’édition, rendez-vous sur : le blog d’Emmanuel Pierrat, avocat au barreau de Paris.

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18 Replies to “Quel cadre juridique pour l’auto-édition?”

  1. Daniel Pagés dit :

    Ben… en pratique, ce monsieur ne nous dit pas grand chose… Alors je vais parler de mon expérience personnelle.
    J’ai opté il y a 6 mois pour le statut d’autoentrepreneur. En tant qu’auteur-éditeur je me suis déclaré comme faisant de l’édition et de la vente de livres comme activité principale. L’avantage du statut c’est la simplicité autant pour la déclaration que pour le fonctionnement. Déclaration sur internet et un mois plus tard on reçoit le N° SIRET. Chaque trimestre je déclare mon chiffre d’affaires et je joins à la déclaration un chèque représentant charges + impôt sur le revenu (13% du CA du trimestre); Comptabilité très simplifiée à tenir. Pas de TVA. pas de taxe professionnelle pendant 2 ans.
    L’inconvénient, c’est qu’en fait, mes frais ne rentrent pas en compte pour le calcul des charges sociales. Imaginez que la première année j’ai besoin d’acheter un ordinateur et des logiciels, un véhicule, une machine à relier, à plastifier, etc., ben le fisc considèrera que j’ai fait du bénéfice alors que je suis en déficit grave !! D’autre part je ne récupèrerai pas de TVA sur les achats !
    Autre inconvénient, le libraire qui prend mes livres, lui, ne pourra pas récupérer la TVA. Ce qui lui fait un manque à gagner de 5,5%… il fait la gueule et je vais devoir augmenter ma remise !
    Alors, je me pose la question, dois-je changer de régime fiscal et passer au réel simplifié…
    Si quelqu’un a une expérience plus longue j’aimerais avoir son avis…

  2. Remi Dequidt dit :

    Il est bien connu qu’on gagne rarement sa vie avec un livre publié; c’est sans doute encore plus vrai avec un livre auto-édité. Dans le meilleur des cas, on peut espérer rentrer dans ses frais et se faire un peu connaître.
    Dans ce cadre, l’auto-entreprenariat est donc une grave erreur. L’administration fiscale vous taxe sur un pourcentage de vos recettes, et donc sur un montant positif dès le premier livre vendu.
    Ensuite, ne pas être soumis à la TVA est une seconde erreur ; pour des raisons que ma mère trouve trop complexe à expliquer ici, l’auteur se fera certainement rembourser de la TVA par les services des impôts (en gros : il vend à 5,5% et récupère sur ses achats à 19,6%).
    La constitution d’une société commerciale, avec la détermination d’un résultat réel, est probablement la solution la plus évidente. L’auteur de l’article ne semble pas connaître la SAS ou la SASU qui sont devenues d’un fonctionnement très souple. Je ne vois même pas l’utilité d’évoquer encore la SA !
    Remi Dequidt
    (auteur à insuccès, et accessoirement expert comptable)

  3. @ daniel
    Voilà bien présentées ici les LIMITES du statut d’auto-entrepreneur.
    Tant qu’on travaille (ou « déclare ») un faible volume d’activité c’est bien. A condition de ne pas travailler pour des professionnels (ils raisonnent HT) et de n’avoir à supporter que le coût de son temps de travail.
    Dès que l’on a des frais, le statut devient idiot et la « fausse » impression de la faiblesse des charges (13%) est rapidement supérieure à ce que l’on aurait à payer avec un statut « normal ».
    Auto-entrepreneur, oui un bon statut, si vous ne facturez que des heures de travail à des particuliers (ht) qui habitent à côté de chez vous (pas de frais de déplacements) en leur laissant acheter les fournitures dont vous avez besoin (pas d’achats non déductibles).
    Dans tous les autres cas : à proscrire

  4. Rivaud dit :

    Daniel décrit parfaitement le statut de l’autoentrepreneur. Je suis exactement dans le même cas de figure et me suis interrogée sur l’opportunité d’envisager un changement de statut. Toutefois, mon entretien avec l’expert-comptable de la Chambre du Commerce a été parfaitement instructif : je n’ai aucun intérêt à changer de régime, car tous les autres statuts imposent le paiement de charges annuelles à hauteur de 4000 euros, quel que soit votre chiffre d’affaire.
    Pour l’heure, le statut d’Autoentrepreneur me semble en effet relativement intéressant (6 mois d’expérience également). Certes, mes frais ne sont pas déductibles, mais les charges et le taux d’imposition sont très raisonnables.
    Mes relations avec les libraires sont sans écueil. Un seul a « tiqué », me demandant d’augmenter sa commission. Avec les autres, y compris les grandes enseignes, tout passe comme une lettre à la poste !
    A ce jour, le bilan me semble positif.
    Affaire à suivre, bien sûr….

  5. Remi Dequidt dit :

    Exactement les inconvénients signalés juste au-dessus.
    (La solution à ces inconvenients est indiquée également).

  6. Paula dit :

    Bonjour

    A priori – il n’y a pas de statut fiscal idéal pour un auteur auto-édité.
    Comme d’ailleurs dans beaucoup de cas.

    Mais juste de bonnes solutions suivant votre CA – vos ventes de livres.

    Le statut d’auto-entrepreneurs est assez souple est adaptée pour des ventes raisonnables – au-delà d’un certains seuil de CA – il est clair qu’il n’est plus du tout adapté.

    Paula

  7. Bruno dit :

    Je travaille sous statut associatif depuis 1984 pour l’ensemble de mes activités (nombreuses et diverses). Rien vu de plus souple jusqu’ici.
    J’ai mis sur ce forum un résumé d’une discussion à ce sujet.

  8. Bertrand Nino dit :

    Bonjour,
    Je relance ce sujet malgré le temps passé….
    j’aimerais que Daniel me fasse profiter de son expérience à ce jour.
    Où en es tu ? As-tu changé de statut et que me conseilles-tu ?
    Je souhaite également auto-édité mon livre. (roman fantasy)
    J’ai réalisé mes presses moi même ainsi que la raineuse et rénové un massicot. Donc cette part de matériel ne m’a pas coûté trop cher.

    Les 13 % me semblent également élevé, ne serait ce pour les simples frais
    d’imprimantes laser, toner , tambour , papier et autres fournitures qui ne sont pas déduit… Evidemment on ne parle pas des heures de travail non rémunérées.
    Cependant Je ne souhaite avoir aucune comptabilité à faire… donc ce statut me paraissait le plus facile…
    Avec l’arnaque des frais postaux, le prix du livre doit être ridicule pour espérer vendre par correspondance… Donc des bénéfices casi-inexistant.

    Cette solution me parait envisageable tant que l’on à pas à payer la taxe professionnelle qui plomberait complétement le misérable bénéfice réalisé vu
    la quantité produite et vendue en auto-édition.
    Peut-on envisager une activité de deux ans (pour essai) et résilier ce statut avant d’avoir à payer une taxe ?… et quel est le montant actuel de cette taxe pour disons un chiffre d’affaire de 5000 euros annuel (dans le meilleur des cas)
    Je précise que je travaille à mi temps en tant que salarié…. donc je cotise déjà comme tout ouvrier…. Existe-t-il un statut pour une activité complémentaire ?
    Une autre question tout bête : Si je créé un site et vend mes livres, je suppose que les frais d’envois payés par l’acheteur ne rentrent pas en compte dans le chiffre d’affaire ?
    Voilà, tout expérience de personne dans mon cas sera la bienvenue.
    Merci pour vos réponses.
    Bertrand Nino

  9. chatelain dit :

    Autoentrepreneur et auto-édition vont bien ensemble, mais comment faire si on est 3 auteurs ?

    Merci de vos réponse
    Patrick

    1. Jenni dit :

      Je me pose la même question.. !

  10. chatelain dit :

    Pour Bruno,

    tu travailles tes activités en association, comment fais-tu pour te payer ?

  11. Degouté dit :

    Bonjour,
    Malheureusement je ne viens pas donner mon expérience. Pour l’instant, j’essaie de trouver la meilleure sauce pour me faire bouffer par les impôts-possible et inimaginable. Je n’aurais jamais pensé qu’il y avait un impôt sur tout…j’ai peur de me gratter les fesses car je pourrais dépassé un barème invisible et me retrouver hors la loi, et déclencher un contrôle fiscal qui m’exterminerait financièrement. Le premier qui colonise l’oxygène de l’air….s’impôsera! lol
    Pourtant on ne peut pas dire, qu’il n’y a pas l’envie…l’envie de s’en sortir financièrement ou limité la casse …le tout en faisant un truc légale, que l’on Aime : écrire.
    J’ai lu beaucoup de chose sur comment vendre un ebook en toute légalité…et se faire quelque poussière d’argent…ciel, quel enchevetrement de phrases complexes.
    Ma position actuelle : Le flou pure…oui voilà la seule chose a retenir c’est que nul ne sait a la manière d’un scientifique, quel serait la meilleure astuce pour éviter la bouche vorace et sans estomac du fisc.
    Mon sentiment, c’est que quoique tu fasses tu te retrouveras, a devoir des sommes folles pour un euros gagné a une entité qui ne t’a rendu aucun service. Si l’on était dans un pays capitaliste, cela n’aurait aucun sens économique de perdre autant de dollars pour des services volants non identifiés.
    Je vous souhaite a tous bon courage, bonne continuation…même si je n’ai aucune solution pour cette planète de fous….heu, quoique!

  12. brun dit :

    Je vais sortir environ 400 livres; comment faire pour les déclarer sachant que je ne suis pas sûr de les vendre tous. Merci de votre réponse

  13. sadarnac dit :

    Bonjour, ma mère veut éditer ses carnets de voyage, elle a déjà contacté l’imprimeur et prépare un bulletin de souscription pour anticiper les ventes. j’aimerais savoir les démarches à accomplir pour ne pas avoir de problèmes avec le FISC après réception des chèques, y a t-il un montant que l’on peut gagner sans le déclarer, sachant qu’elle est à la retraite…etc … etc …

  14. CERF-TOURNIER dit :

    Bonjour,
    En tant qu’auto-éditeur j’avais publié à mes frais un petit livre humoristique de 50 pages il y a un an et j’avais fait un tirage de deux cents exemplaires, mis en dépôt-vente dans une grande enseigne. J’en ai vendu même pas la moitié…
    Mais j’avais promis cette année de sortir le tome 2 de cet ouvrage. Chose faite, fin février j’ai fait imprimer une centaine d’exemplaires de ce nouveau livre et même si tout semblait correct (I.S.B.N., date et lieu de l’imprimeur…) j’ai appris que la Bibliothèque Nationale de France n’acceptait plus de Dépôt Légal aux auto-éditeurs et que ce dépôt légal a été donc refusé, ce qui m’interdit de mettre en vente ce tome 2 et me contrait à détruire tout mon stock de livres et donc de troiver un véritable éditeur. La galère, car personne n’en veut… Qui peut donner une solution à un tel gâchis..? Merci.

    1. Moineau dit :

      Je ne met pas en doute votre bonne foi, mais je ne comprends pas car sur le site de la bnf je lis ce soir ceci:
      « En France, le dépôt légal est obligatoire pour l’éditeur, l’imprimeur, l’importateur et le producteur. Il s’applique également aux auteurs auto édités. L’éditeur et l’importateur doivent faire le dépôt à la Bibliothèque nationale de France. L’imprimeur doit faire le dépôt auprès de la bibliothèque habilitée à le recevoir dans sa région. »

      Ainsi, c’est étrange que la bnf vous ai refuser votre dépôt légale.

  15. Johanna dit :

    Bonjour je me permets de vous poser une ou deux questions:
    J’ai écrit un livre il y a un an et fait une maigre prévente. Je n’ai fait aucun bénéfice car l’imprimerie m’a coûté plus chère que le livre mis en prévente.
    Je n’ai aucun statut pour l’instant.
    Je suis en train de rajouter des pages à mon livre et là aussi je ne ferai aucun profit car l’impression livre me coûtera plus cher. Donc des bénéfices inexistant.
    Pour les impôts je ne dois pas déclarer la vente de livre sans avoir soustrait les frais d’imprimerie ?
    Je ne vois pas l’interêt de déclarer une somme que nous n’avons pas eu dans notre porte monnaie.
    Et si on a un statut auto entrepreneur peut on réellement le quitter si au bout de deux plus de ventes…et même avant?
    « Je re poste aussi les questions intéressantes de Bertrand :
    Cette solution me parait envisageable tant que l’on à pas à payer la taxe professionnelle qui plomberait complétement le misérable bénéfice réalisé vu
    la quantité produite et vendue en auto-édition.
    Peut-on envisager une activité de deux ans (pour essai) et résilier ce statut avant d’avoir à payer une taxe ?
    Je précise que je travaille à mi temps en tant que salarié…. donc je cotise déjà comme tout ouvrier…. Existe-t-il un statut pour une activité complémentaire ?
    Une autre question tout bête : Si je créé un site et vend mes livres, je suppose que les frais d’envois payés par l’acheteur ne rentrent pas en compte dans le chiffre d’affaire ?
    Voilà, tout expérience de personne dans mon cas sera la bienvenue.
    Merci pour vos réponses.
    Bertrand Nino »

    Merci de vos lumières
    Johanna

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