Bret Easton Ellis, né en 1964, est un romancier américain. Ses romans tels qu’American Psycho (1991) ou Les lois de l’attraction (1987), sont de violentes critiques de la société. Il a annoncé dernièrement qu’il publierait une suite à American Psycho, plus de 20 ans après la sortie du premier livre. Ses romans ont souvent été adaptés au cinéma. Il revient, dans cette interview réalisée par The Write Stuff, sur cette complémentarité entre les médias audiovisuels et ses écrits.
Quel est le point de départ de vos romans ?
Quand est sorti Moins que Zero (1995), tout le monde a cru qu’il s’agissait d’un roman autobiographique. Certes c’était un roman à la première personne, et les gens prennent souvent cela pour de l’autobiographie. Quand j’ai écrit ce livre, je me suis mis dans la peau d’un personnage qui n’avait plus aucune morale. Pour American Psycho, je voyais le héros, Patrick Bateman, comme une métaphore qui dévoilait tout ce qui n’allait pas dans les années 80 : le consumérisme, l’avarice, le côté serial killer « chic »…
En fait, je pense que, d’une certaine manière, tout roman est « autobiographique » parce qu’il témoigne de ce que l’on ressent. J’en ai eu conscience avec American Psycho. Non pas parce que, comme Patrick Bateman, je travaillais à Wall Street ou que je tuais des prostitués, mais parce que le ton du livre reflétait parfaitement l’humeur dans laquelle j’étais lorsque je l’ai écrit. Je pense que c’est cela, le point de départ, notre humeur. Si j’avais était heureux et épanoui en écrivant le roman, il aurait été tout à fait différent, beaucoup moins violent et moins amer.
D’où vient votre style, à la fois parlé mais très stylisé ?
Je pense que c’est grâce aux nombreux films que j’ai vus, livres que j’ai lus, et aux nombreuses heures passées devant la télévision. Si vous voulez être écrivain, c’est de là que ça vient. Des livres, des films, de la télévision et du Rock’n Roll.
Les médias inspirent toutes formes d’art. Inconsciemment, et que nous le voulions ou pas, la télévision a façonné notre vision du monde. Comment ? Je ne sais pas. Est-ce bien ou mal ? Je ne sais pas, c’est ainsi. Ce que je trouve inquiétant par contre, c’est la manière dont Internet façonne notre rapport à l’écriture et à la lecture. Les gens lisent sur le net, ils n’ont plus de contact avec le livre. Je suis de la vieille école, j’ai très peur du progrès.
Dans Zombie (1994) par exemple, il y a tout un passage épistolaire. Les jeunes n’écrivent plus de lettres. Mais pour moi, ce passage était important, et pas seulement pour faire revivre une pratique qui ne se fait quasiment plus. Au niveau de l’écriture et de la lecture, je trouve que les lettres fonctionnent mieux que les dialogues. Ça veut dire quelque chose en terme de mise en page, de pauses et d’espace laissé vide. Je pense constamment à ces choses quand j’écris. Si je trouve qu’un passage n’est pas visuellement bien fait, qu’il est trop long, qu’il coupe le rythme, je recommence.